Regards croisés sur le logement depuis 2020

Données, tendances et réalités du logement en France

Vieillissement du parc immobilier français et défis de rénovation énergétique des logements anciens

Un parc de logements qui continue de croître, mais à un rythme ralenti

En 2020, la France comptait près de 36,6 millions de logements, selon les données de l’Insee. Ce chiffre a continué d’augmenter, mais la progression ralentit depuis plusieurs années. Entre 2020 et 2023, le rythme annuel moyen de construction de logements neufs est passé en dessous des 400 000, bien en-deçà de l’objectif de 500 000 logements par an fixé par les précédents gouvernements. Les effets conjugués de la crise sanitaire, de la hausse des coûts de construction, des difficultés d’accès au foncier et du durcissement des normes énergétiques ont contribué à freiner l’élan.

Dans le même temps, le parc immobilier français vieillit. Près de 40 % des résidences principales ont été construites avant 1975. Ce vieillissement pose des enjeux majeurs en matière de rénovation thermique, d’adaptation à la dépendance ou de qualité de l’air intérieur. Les aides publiques telles que MaPrimeRénov’ ont été renforcées, mais leur effet reste contrasté sur la rénovation en profondeur du parc existant.

Autre transformation structurelle : la part des résidences secondaires et des logements vacants continue d’augmenter dans certaines zones. Cela alimente une pression sur l’offre disponible, en particulier dans les territoires attractifs (littoral, montagne, zones touristiques), où les actifs peinent à se loger à proximité de leur lieu de travail.

Amélioration des conditions de logement en France avec plus d’espace et de meilleurs équipements depuis 2020

Des conditions de logement qui s’améliorent globalement, mais avec des disparités marquées

Sur le papier, les conditions de logement se sont améliorées sur plusieurs plans depuis 2020. En moyenne, les ménages disposent d’un logement plus spacieux qu’il y a vingt ans, avec 40 m² par personne en 2021 contre 31 m² au début des années 1990. L’équipement des logements (salle de bains, cuisine, chauffage central) est également en nette amélioration. La proportion de logements considérés comme « surpeuplés » est en recul lent mais régulier.

Mais ces moyennes cachent de fortes inégalités. Les jeunes actifs, les étudiants, les familles monoparentales et les ménages modestes sont les plus exposés aux situations de mal-logement. En 2023, selon la Fondation Abbé Pierre, près de 4 millions de personnes étaient concernées par une forme de fragilité liée au logement : absence de logement personnel, conditions d’habitat indignes, précarité énergétique ou instabilité résidentielle.

Le phénomène de précarité énergétique, en particulier, s’est accentué avec la hausse des prix de l’énergie entre 2021 et 2023. Environ 12 % des ménages déclaraient en 2023 avoir eu froid dans leur logement au moins une fois pour des raisons économiques. Ce chiffre grimpe à plus de 20 % dans les passoires thermiques classées F ou G. La performance énergétique est désormais un critère central dans les politiques publiques de l’habitat, mais aussi dans les décisions d’achat ou de location.

Augmentation du poids du logement dans le budget des jeunes et ménages modestes, frein à l’accès à l’autonomie résidentielle

Des dépenses de logement en hausse pour une part croissante des ménages

La part du logement dans le budget des ménages a poursuivi sa progression depuis 2020. En 2022, selon l’Insee, les dépenses liées au logement (loyers, charges, énergie, entretien) représentaient en moyenne 26 % du revenu disponible des ménages, contre 23 % en 2005. Pour les locataires du parc privé, cette proportion dépasse souvent 30 %, en particulier dans les grandes agglomérations et les zones tendues.

Le poids croissant du logement dans les dépenses pèse fortement sur les budgets des jeunes et des ménages modestes. Cela freine l’accès à l’autonomie résidentielle, allonge la durée de cohabitation intergénérationnelle et complexifie les trajectoires résidentielles. Pour les accédants à la propriété, la hausse des taux d’intérêt depuis 2022 a également modifié les équilibres. Le pouvoir d’achat immobilier a reculé de près de 20 % en deux ans dans certaines métropoles.

Face à cette réalité, les aides personnelles au logement (APL) continuent de jouer un rôle d’amortisseur social. Toutefois, les réformes successives et la complexité des critères de calcul ont fragilisé la lisibilité et l’efficacité du dispositif. Le taux d’effort des ménages reste un indicateur clé pour suivre les tensions, et il tend à se stabiliser à un niveau historiquement élevé dans de nombreux territoires.

Disparités territoriales du logement en France : zones tendues avec forte demande et territoires ruraux en déclin

Une géographie du logement toujours plus contrastée

Enfin, l’analyse territoriale révèle une France du logement à plusieurs vitesses. Les zones tendues – métropoles, littoraux, franges frontalières – connaissent une pression constante sur l’offre, une forte concurrence entre ménages, des loyers élevés et des difficultés d’accès au logement social. À l’inverse, d’autres territoires, souvent ruraux ou en déclin démographique, cumulent logements vacants, dégradation du bâti et faible attractivité du marché.

La mobilité résidentielle s’est par ailleurs recomposée depuis la crise sanitaire. Le télétravail a permis à certains actifs de s’installer plus loin des grands centres, contribuant à la montée des prix dans des communes périurbaines ou rurales proches des bassins d’emploi. Ce phénomène reste marginal en volume mais significatif pour certains territoires. Il modifie les équilibres entre offre et demande, ainsi que les politiques d’aménagement.

Les politiques publiques cherchent à accompagner ces mutations. La loi Climat et Résilience, en interdisant la mise en location de logements les plus énergivores à partir de 2025, incite à la rénovation. Le zonage des aides à la pierre ou à l’accession est régulièrement ajusté pour mieux coller aux réalités locales. Mais les outils restent encore inégalement répartis, et les capacités d’intervention des collectivités sont parfois limitées face à l’ampleur des besoins.

Ce blog s’inscrit dans cette volonté de mieux documenter et comprendre les lignes de fracture, les trajectoires contrastées et les dynamiques de fond qui façonnent le logement des Français depuis 2020. Nous poursuivrons, dans les prochains articles, l’exploration de ces enjeux à travers des dossiers thématiques, des données clés et des analyses ciblées.

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